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How to use Le Petit Prince en quebecois
The best way to start learning Quebecois French is to listen to the recording (above) while reading the text. Get used to the sounds, the contractions, and the vocabulary, without trying to understand everything. Then, refer back to the glossary and the other material separately, for more explanations.
Chapitre 8
J’ai appris ben vite à mieux connaître cette fleur. Y’avait toujours eu, s’a planète du petit prince, des fleurs ben simples, ornées d’un seul rang de pétales, et qui gigotaient, et qui dérangeaient personne. E’s apparaissaient un matin dans l’herbe, pis e’s s’éteignaient le soir. Mais celle-là avait germé un beau jour, d’une graine apportée d’on ne sait où, et le petit prince avait surveillé de très près cette brindille-là qui ressemblait pas pantoute aux autres brindilles. Ça pouvait être un nouveau genre de baobab. Mais l’arbuste a vite cessé de croître, et a commencé à préparer une fleur. Le petit prince, qui assistait à l’installation d’un bouton énorme, sentait ben qu’y en sortirait une apparition miraculeuse, mais la fleur en finissait pas de se préparer à être belle, à l’abri de sa chambre verte. A choisissait avec soin ses couleurs. A s’habillait lentement, a’l ajustait un à un ses pétales. A voulait pas sortir toute fripée comme les coquelicots. A voulait apparaître que dans le plein rayonnement de sa beauté. Eh! oui. E’était très coquette ! Sa toilette mystérieuse avait donc duré des jours et des jours. Et pis v’là qu’un matin, justement à l’heure du lever du soleil, a s’était montrée.
Pis elle, qui avait travaillé avec tant de précision, a dit en bâillant :
– Ah ! Je me réveille à peine… Je vous demande pardon… Je suis encore toute décoiffée…
Le petit prince, alors, a pas pu contenir son admiration :
– Vous êtes donc ben belle!
– N’est-ce pas, a répondu doucement la fleur. Et je suis née en même temps que le soleil…
Le petit prince a ben deviné qu’e’était pas trop modeste, mais e’était si émouvante !
– C’est l’heure, je crois, du déjeuner, avait-elle bientôt ajouté, auriez-vous la bonté de penser à moi…
Pis le petit prince, tout confus, ayant été chercher un arrosoir d’eau fraîche, avait servi la fleur.
Ainsi a’l’avait ben vite tourmenté par sa vanité un peu ombrageuse. Un jour, par exemple, en parlant de ses quatre épines, a’l avait dit au petit prince :
– Ils peuvent venir, les tigres, avec leurs griffes !
– Y’a pas de tigres su’ ma planète, avait objecté le petit prince, et pis les tigres mangent pas l’herbe.
– Je ne suis pas une herbe, avait doucement répondu la fleur.
– Pardonnez-moi…
– Je ne crains rien des tigres, mais j’ai horreur des courants d’air. Vous n’auriez pas un paravent?
« Horreur des courants d’air… c’est pas de chance, pour une plante, avait remarqué le petit prince. Cette fleur-là est ben compliquée… »
– Le soir vous me mettrez sous globe. Il fait très froid chez vous. C’est mal installé. Là d’où je viens…
Mais a s’était interrompue. E’était venue sous forme de graine. A’avait rien pu connaître des autres mondes. Humiliée de s’être laissé surprendre à préparer un mensonge aussi naïf, a’avait toussé deux ou trois fois, pour mettre le petit prince dans son tort :
– Ce paravent ?…
– J’allais le chercher mais vous me parliez !
Alors elle avait forcé sa toux pour y infliger quand même des remords.
Ainsi le petit prince, malgré la bonne volonté de son amour, avait vite douté d’elle. Y’avait pris au sérieux des mots sans importance, pis était devenu très malheureux.
« J’aurais dû pas l’écouter, m’a-t-il confié un jour, y faut jamais écouter les fleurs. Y faut les regarder pis les respirer. La mienne embaumait ma planète, mais je savais pas m’en réjouir. Cette histoire de griffes, qui m’avait tellement gossé, aurait dû m’attendrir… »
Y m’a confié encore :
« J’ai rien compris ! J’aurais dû la juger sur les actes et non sur les mots. A m’embaumait et m’éclairait. J’aurais jamais dû m’enfuir ! J’aurais ben dû deviner sa tendresse derrière ses pauvres ruses. Les fleurs sont si contradictoires ! Mais j’étais trop jeune pour savoir l’aimer. »
Chapitre 9
Je crois qu’il a profité, pour son évasion, d’une migration d’oiseaux sauvages. Au matin du départ y’a mis sa planète ben en ordre. Y’a ramoné soigneusement ses volcans en activité. Y possédait deux volcans en activité. Pis c’était ben commode pour faire chauffer le déjeuner du matin. Y possédait aussi un volcan éteint. Mais, comme y disait, « On sait jamais ! » Y’a ramoné également le volcan éteint. S’y sont ben ramonés, les volcans brûlent doucement et régulièrement, sans éruptions. Les éruptions volcaniques sont comme des feux de cheminée. Évidemment sur notre terre nous sommes beaucoup trop petits pour ramoner nos volcans. C’est pourquoi y nous causent des tas d’ennuis.
Le petit prince a aussi arraché, avec un peu de mélancolie, les dernières pousses de baobabs. Y croyait jamais devoir revenir. Mais tous ces travaux familiers y ont paru, ce matin- là, extrêmement doux. Pis, quand y’a arrosé une dernière fois la fleur, pis s’est préparé à la mettre à l’abri sous son globe, y s’est découvert l’envie de pleurer.
– Adieu, a-t-il dit à la fleur.
Mais a lui a pas répondu.
– Adieu, a-t-il répété.
La fleur a toussé. Mais c’était pas à cause de son rhume.
– J’ai été sotte, lui a-t-elle enfin dit . Je te demande pardon. Tâche d’être heureux.
Y’a été surpris par l’absence de reproches. Y restait là tout déconcerté, le globe en l’air. Y comprenait pas cette douceur calme.
– Mais oui, je t’aime, lui a dit la fleur. Tu n’en as rien su, par ma faute. Cela n’a aucune importance. Mais tu as été aussi sot que moi. Tâche d’être heureux… Laisse ce globe tranquille. Je n’en veux plus.
– Mais le vent…
– Je ne suis pas si enrhumée que ça… L’air frais de la nuit me fera du bien. Je suis une fleur.
– Mais les bêtes…
– Il faut bien que je supporte deux ou trois chenilles si je veux connaître les papillons. Il paraît que c’est tellement beau. Sinon qui me rendra visite ? Tu seras loin, toi. Quant aux grosses bêtes, je ne crains rien. J’ai mes griffes.
Pis a montrait naïvement ses quatre épines. Puis a’l’a rajouté :
– Ne traîne pas comme ça, c’est agaçant. Tu as décidé de partir. Va-t’en.
Car a voulait pas qu’il la voye pleurer. C’était une fleur tellement orgueilleuse…
Chapitre 10
Y se trouvait dans la région des astéroïdes 325, 326, 327, 328, 329 et 330. Y’a donc commencé par les visiter pour y chercher une occupation pis pour s’instruire.
La première était habitée par un roi. Le roi siégeait, habillé de pourpre et d’hermine, su’un trône très simple et cependant majestueux.
– Ah ! Voilà un sujet, s’est écrié le roi quand il a aperçu le petit prince.
Et le petit prince s’est demandé:
« Comment ça se fait qu’y peut me reconnaître puisqu’y m’a encore jamais vu ! »
Y savait pas que, pour les rois, le monde est très simplifié. Tous les hommes sont des sujets.
– Approche-toi que je te voie mieux, lui dit le roi qui était tout fier d’être roi pour quelqu’un.